Au pied du mur

Le rapport de la CIASE, commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise, publié le 5 octobre en France, provoque une immense vague de réactions, un tsunami qui déstabilise l’Eglise dans ses rapports à la société contemporaine. Au-delà de ces terribles accusations d’abus sexuels par des clercs et des laïcs, c’est le fonctionnement et l’autorité de l’Eglise qui sont remis en cause : abus de pouvoir, de conscience, cléricalisme… Il y a trois ans déjà le Pape François le soulignait dans sa lettre du 20 août 2018. L’Eglise est au pied du mur !

A Calais, des migrants de toutes nationalités risquent désespérément au risque de leur vie le passage vers l’eldorado de la Grande Bretagne. La situation ne fait qu’empirer et plus aucun dialogue n’est possible avec les autorités. Alors, deux jeunes bénévoles et un prêtre jésuite ont entamé une grève de la faim dans une église pour demander la fin des évacuations et des confiscations de biens des migrants pendant la période hivernale. Ce qui se passe à Calais se répète partout en Europe. Nous savons ce que cela signifie en Belgique. Des hommes, des femmes, des enfants n’ont plus le droit de vivre parce qu’ils sont différents et que notre monde de nantis refuse de les accueillir. La société elle aussi est mise au pied du mur !

Ces deux situations sont emblématiques de notre actualité. Elles nous disent combien notre humanité est malade de son refus de l’autre. Et nous sommes bien impuissants à réagir. Nous risquons même d’hurler avec les loups ! Et pourtant il est temps. D’aucuns font la grève de la faim, d’autres manifestent et écrivent des éditoriaux… Si, de notre côté, nous devons nous informer pour comprendre ce qui se passe et prendre position pour exiger et soutenir les réformes qui doivent être faites, nous avons tous, là où nous vivons, de nombreuses occasions d’écouter, d’accueillir et d’aider celui qui souffre à côté de nous, exilé et exclu, quelle que soit sa situation.

Le synode qui vient de s’ouvrir provoquera certainement l’Église à se renouveler radicalement. La prière sera notre force. Mais il est sûr que la réforme du monde restera de notre responsabilité. Elle commence sur nos lieux de vie. Nous sommes tous au pied du mur !

Henri Aubert sj
Chapelain de la Chapelle Universitaire ND Paix