Dimanche 20 février 2022
Septième dimanche ordinaire (C)

L’amour des ennemis…

Textes de la liturgie (à consulter ici)

  • 1 Samuel 26, 2…23 : David épargne la vie du roi Saül.
  • Psaume 102 : Le Seigneur est tendresse et pitié.
  • 1 Co 15, 45-49 : L’homme, humain et divin.
  • Luc 6, 27-38 : L’amour des ennemis.

“Le portement de Croix” de Jérôme Bosch
(vers 1515 – Musée des Beaux Arts de Gand)
Jésus est le premier à aimer ses ennemis :
“Père pardonne-leur,
ils ne se savent pas ce qu’ils font” (Lc 23,34).

 

L’homélie

Jésus nous place aujourd’hui devant l’infini de l’amour de Dieu. Aimer l’ennemi, se laisser frapper, se laisser déposséder, s’abstenir de condamner. Ce que Jésus décrit là, c’est sa façon de vivre, c’est la façon dont Dieu manifeste son amour pour les hommes à travers la vie du Christ.

Si nous avons le malheur d’entendre ces paroles comme des commandements, comme des impératifs moraux, leur obéir peut sembler tout simplement impossible. Pour reprendre les mots de saint Paul, nous restons les fils d’Adam, faits d’argile. Certes nous aimons nos proches, nous sommes capables d’altruisme, nous avons des moments de générosité. Mais nous ne savons que trop bien combien nous sommes prisonniers de logique de préservation, de réciprocité, de jugement. Comment pourrions-nous aimer tout homme, toute femme que nous rencontrons à la hauteur de l’amour de Dieu ? Comment adopter envers eux une attitude à la hauteur de ce que semble exiger Jésus ? Vraiment, il semble qu’à peine l’amour de parents pour leurs enfants puisse être comparable, dans le meilleur des cas. Il semble impensable de l’étendre à tout homme ou femme que nous rencontrons.

La vraie question n’est donc pas tellement : «Comment vais-je obéir au Christ ? » Elle est plutôt : « Comment vais-je accepter de me laisser transformer par le Christ ? » C’est le passage qu’évoquait saint Paul, passage de l’homme naturel, enfermé dans sa nature, à l’homme spirituel, promis à un avenir. Ce passage nous est offert par le Christ, nous ne pouvons l’accomplir par nos propres forces.

Pour passer d’une logique humaine de lois, de morale à une logique d’amour libre, la première étape est certainement de reconnaitre que, avant d’aimer, je suis aimé par Dieu. Certains diront que cela va de soi. En théorie, soit. Mais finalement, reconnaitre la réalité de l’amour de Dieu pour moi implique de reconnaitre en même temps tout ce qui en moi est loin d’être attirant. Pour percevoir combien l’amour de Dieu est inconditionnel, ne faut-il pas prendre la mesure de mes propres limites ? Et si je n’en passe pas par-là, comment pourrais-je comprendre l’amour de Dieu pour les autres hommes et femmes de ce monde ? Et ayant reconnu cet amour, tenter de m’y associer ?

Car c’est bien là qu’est le nœud de la question. C’est en pure perte que j’essaierai d’aimer de mes propres forces à la hauteur de ce que me suggère Jésus. Par contre, il m’appartient tout à fait de diriger mes forces pour apprendre à aimer comme Dieu aime. Ou plutôt, à aimer avec Dieu. Et il n’y a pas ici de grand secret. Apprendre à aimer avec Dieu, c’est l’associer à ma vie, mettre ma vie sous son regard. C’est aussi apprendre à mieux le connaitre, à travers la figure de Jésus. En pratique, nous voyons bien ce que cela veut dire. Relire ma vie et mes relations dans la prière, méditer l’évangile, fréquenter les sacrements. Laisser, enfin, cette familiarité avec Dieu influencer toujours plus mes choix et mes décisions et, ainsi, donner chair concrète à cet amour pas des actes.

Croire que l’on peut apprendre à aimer comme Jésus nous y invite sans passer par cette familiarité spirituelle, c’est vouloir mettre la charrue avant les bœufs. Pire. C’est passer à côté de l’essentiel et rater la démarche à laquelle Dieu veut nous associer. Dieu ne désire pas des serviteurs obéissants, aussi efficaces soient-ils, mais des enfants qui s’associent librement à son œuvre, portés par une même vision.

Père Benoît Willemaers s.j.
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Pour accompagner la prière

Écoute en toi la source

Paroles : Louis-Marie Grimaud   Musique : Laurent Grzybowski

Écoute en toi la source qui te parle d’aimer
Écoute en toi la source de l’éternité,
Écoute en toi la source qui te fait prier.

  1. Ton cœur est comme une terre où le grain pourra lever
    Si tu l’ouvres à la lumière, si tu laisses l’eau couler !
  2. On n’arrête pas l’eau vive, n’essaie pas de la freiner,
    Dans ton cœur elle ravive la tendresse et la beauté !
  3. La source devient rivière qui t’emmène à l’océan
    Écoute bien les prières qu’elle murmure en cheminant !
  4. Avec Marie, notre exemple d’une terre qui attend,
    Deviens, toi aussi, le temple d’un Dieu qui se fait présent !