Mercredi 1er novembre 2023
La Toussaint
Lectures
- Apocalypse de Jean 7, 2-4.9-14 : Et voilà une foule immense…
- Psaume 23 : Voici le peuple de ceux qui cherchent ta face, Seigneur.
- 1 Jean 3, 1-3 : Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu.
- Matthieu 22, 15-21 : Quel est le grand commandement ?
Lire les textes de la liturgie
Tenir bon dans la tempête
Fra angelico (v. 1400-1455),
les précurseurs du Christ avec les saints et les martyrs, 1423-1424.
National Gallery, Londres.
Homélie
Frères & sœurs,
Si vous suivez un peu la météo, vous aurez sans doute entendu parler de la tempête en provenance de l’Atlantique qui s’apprête à frapper les côtes de la Bretagne et même celles de la Mer du Nord. Et quand une tempête fait rage, on se demande toujours combien d’arbres seront déracinés, combien de pylônes abattus, combien de toits emportés. En espérant, bien sûr, que là où nous sommes, tout tienne bon et que rien ne nous arrive.
Mais, s’il y a des tempêtes et des ouragans dans la nature, il y en a aussi dans le monde des hommes, dans notre humanité. L’actualité présente nous en montre suffisamment d’exemples, de ces ouragans de violence qui se déchaînent et dont on se demande où ils nous conduiront et s’ils n’annoncent pas des tempêtes plus grandes encore…
A titre personnel, je suis frappé d’observer comment la mécanique du mal se met en place, comment elle semble impossible à stopper ou à dévier, comment elle oblige et contraint. Comment les décisions de quelques-uns entraînent et aveuglent les foules, comment cette haine de l’autre, cette violence, cultivée, entretenue, exacerbée, se déchaîne apparemment sans limite, en sorte que l’on se demande : comment tenir dans cette tempête ? Comment garder le cap ? Comment ne pas se laisser entraîner soi-même par la colère, le ressentiment, et par cette foule de sentiments négatifs et destructeurs qui nous assaillent ? Oui, comment tenir bon dans la tempête ?
Et voilà qu’au milieu de tout cela, l’Église nous invite à fêter la Toussaint, la fête de tous ces hommes et de toutes ces femmes dont la vie a été le signe, la parole, l’expression de la présence de Dieu au cœur de ce monde, aux antipodes de la haine et de la violence. Quel contraste ! Et quelle espérance ! Car le propre du mal, c’est de nous faire croire qu’il n’y a que lui, qu’il n’y a pas d’autres manières d’être ou d’agir, entraînant désespérance et découragement.
Or, face à cela, nous entendons une petite voix intérieure murmurer une autre parole, une autre issue, la parole évangélique : « Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, le Royaume des Cieux est à eux ; heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu ; heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ; heureux les doux, ils recevront la terre en héritage. » Oui, une autre voie est possible.
Il nous faut, je crois, laisser résonner, laisser jouer ce terrible contraste : haine et violence du monde, douceur et paix évangéliques. Non pas comme un anti-douleur qui nous endormirait pour nous aider à supporter l’insupportable en nous voilant la face, mais comme un appel à notre responsabilité, un appel à notre vocation de chrétiens, de disciples du Christ, de sainteté, là où nous sommes. Car ce contraste entre le monde et l’Évangile ne fait pas de l’Évangile une utopie pour doux rêveurs, mais le lieu d’un choix existentiel radical qui nous concerne et nous implique, choix où se joue, à notre échelle, le même combat que celui qui se joue à l’échelle du monde. De quel côté mes paroles et mes silences, mes actes et mes abstentions vont-ils faire pencher la balance ? Du côté de la division, de la méfiance, de la rancune, de la vengeance, de la haine, ou du côté de la paix, de la compassion, de la bénédiction, de la vie ?
Et ne croyons pas que la réponse à cette question soit évidente. Car c’est précisément lorsque nous avons de bonnes raisons de médire, de nous venger, de haïr, que ce choix se pose à nous de façon cruciale : de quel côté ferons-nous alors pencher la balance, quelle voie choisirons-nous d’emprunter. C’est là que l’appel à la sainteté que nous entendons aujourd’hui retentit effectivement et concrètement dans notre vie.
Aucun d’entre nous n’est en position de résoudre le conflit au Moyen-Orient, en Ukraine, au Sud-Soudan, au Yémen, en Birmanie… Par contre, là où nous sommes, nous pouvons, à notre échelle, changer la donne et rendre le monde plus respirable : en choisissant, là où cela dépend de nous, le bien, la réconciliation et la vie.
Comment tenir bon dans la tempête ? Il n’y a pas 36 solutions. Il nous faut, résolument, nous enraciner dans le Christ et dans sa parole ; il nous faut, résolument, garder les yeux fixés sur Jésus et sur sa vie qui nous montre le seul chemin qui tienne, il nous faut, résolument, choisir la vie évangélique. En sachant le prix de ce choix, mais aussi son enjeu et sa noblesse dont nous parle saint Jean : « Bien-aimés, voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. Voici pourquoi le monde ne nous connaît pas : c’est qu’il n’a pas connu Dieu. Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu (..) Nous le savons : quand cela sera manifesté, nous lui serons semblables car nous le verrons tel qu’il est. »
Voilà la sainteté à laquelle nous sommes appelés, devenir enfants de Dieu, semblable à lui. Gardons l’espérance chevillée au cœur, malgré tout, par-dessus tout. Gardons la Parole de Jésus comme une promesse indéracinable, comme notre boussole : Heureux êtes-vous si vous choisissez la voie et la vie des béatitudes, la voie de la sainteté. « Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux. »
Amen !
Père Paul Malvaux sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur
Un chant pour accompagner notre méditation
Au cœur de ce monde
Texte : Didier Rimaud – Musique : Jacques Berthier
Au cœur de ce monde, le souffle de l’Esprit
fait retentir le cri de la bonne nouvelle !
Au cœur de ce monde, le souffle de l’Esprit
met à l’œuvre aujourd’hui des énergies nouvelle !
- Voyez ! les pauvres sont heureux :
Ils sont premiers dans le Royaume !
Voyez ! les artisans de Paix :
Ils démolissent leurs frontières !
Voyez ! les hommes au coeur pur :
Ils trouvent Dieu en toute chose ! - Voyez ! les affamés de Dieu :
Ils font régner toute justice !
Voyez ! les amoureux de Dieu :
Ils sont amis de tous les hommes !
Voyez ! les doux sont vainqueurs :
Ils font que dansent les montagnes ! - Voyez ! le peuple est dans la joie :
L’amour l’emporte sur la haine !
Voyez ! les faibles sont choisis :
Les orgueilleux n’ont plus de trône !
Voyez ! les doux qui sont vainqueurs :
Ils ont la force des colombes !