Dimanche 4 février 2024

Quatrième dimanche ordinaire (B)

Lectures

  • Job 7, 1-4.6-7 : Souviens-toi, Seigneur, ma vie n’est qu’un souffle.
  • Psaume 146 : Bénissons le Seigneur qui guérit nos blessures.
  • 1 Corinthiens : 9, 16-19.22-23 : Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile.
  • Marc 1, 29-39 : Tout le monde te cherche.

Lire les textes de la liturgie

La compassion, puissance de résurrection

Guérison de la belle-mère de Simon Pierre
Enluminure sur parchemin, Codex de Hitda,  vers 1020 – Darmstadt, Allemagne

Homélie

Frères et sœurs,

Vivre est difficile. La première lecture de ce jour tirée du livre de Job nous met devant la dure réalité de la vie.  Une forme de difficulté extrême dans la vie, c’est la souffrance.  « Vraiment, dit Job, la vie de l’homme sur la terre est une corvée. Je ne compte que des nuits de souffrance ». Il est vrai que si l’on regarde autour de nous, il y a des gens pour qui, dès le lever du jour, la souffrance est là qu’elle soit physique comme dans la maladie, psychique comme dans la dépression ou sociale comme dans la pauvreté et l’exclusion.  Pour certains de nos frères et sœurs en humanité, vivre, c’est souffrir, sans espoir qu’il en soit autrement.  « Mes yeux ne verront plus le bonheur », dit encore Job. Cela peut être vrai ou devenir vrai pour chacun et chacune d’entre nous.

L’évangile vient ouvrir une brèche dans cet enfermement dans la souffrance. Si l’on regarde l’ensemble du comportement de Jésus dans les évangiles, ce que l’on voit, c’est un comportement d’une extrême sensibilité à toutes les souffrances et la volonté de les soulager. Jésus compatit avec la souffrance des autres ; il n’a de souci que de les en délivrer. Lorsqu’on ouvre les évangiles, on y lit aussitôt des récits – comme aujourd’hui – où Jésus est aux prises avec la souffrance de gens qui demandent son secours. Jésus manifeste une capacité de se laisser émouvoir – de se laisser mouvoir – par la souffrance et la supplication des autres. Voici quelques phrases de l’évangile qui illustrent cette capacité de compassion de Jésus. « Voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger » (Mt 9,36). Face au lépreux qui le supplie, « Jésus, pris de pitié, étendit la main et le toucha » (Mc1,41). Devant la veuve qui pleure son fils, « Jésus fut pris de pitié pour elle et il lui dit `ne pleure pas´, il s’avança et toucha la civière » (Lc 7,13-14). « J’ai pitié de cette foule car voilà trois jours qu’ils sont là et n’ont pas de quoi manger » (15,32). Ou encore, devant les deux aveugles de Jéricho, « Jésus, pris de pitié, leur toucha les yeux » (Mt 20,34).

Dans l’évangile d’aujourd’hui, on lit que Jésus guérit de nombreux malades et des personnes dominées par des esprits destructeurs. La nouvelle se répand dans toute la ville, souligne le récit. Cela devient un événement social qui touche tout le monde.  C’est ainsi que de partout, on lui amène des malades et des démoniaques. Les gens viennent à lui attirés par sa capacité de les faire sortir de la souffrance ; ils sont attirés par sa puissance de salut. Ce dont Jésus est ainsi porteur, par sa prédication comme par ses actes, c’est du témoignage de la tendresse de Dieu pour l’humanité souffrante.

La question qui se pose et qui nous est posée, c’est de savoir jusqu’où va cette puissance de salut. Car l’humanité souffrante, c’est l’humanité mortelle. Et l’ultime souffrance qui touche l’humanité, c’est la mort elle-même. Rappelons-nous. Jésus est profondément touché et troublé par la mort de son ami Lazare. Et il pleure.

Ce qu’il nous faut comprendre au point où sous en sommes ici, c’est que, lorsque jésus compatit avec les souffrants et soulage leur souffrance, c’est déjà la délivrance de la mort qui est en cours. Le projet de Dieu, c’est que l’homme vive et soit délivré de toutes les formes de souffrance et finalement de la mort elle-même. Ainsi, les récits évangéliques de guérison sont-ils des récits qui, en filigrane, laissent entrevoir, anticipativement et symboliquement, la victoire sur la mort elle-même.

Arrêtons-nous, par exemple, au récit de la guérison de la belle-mère de Pierre que nous avons entendu aujourd’hui. Il en est une illustration. On parle à Jésus de la malade, dit le récit. Jésus s’approche, la voit en proie à la fièvre, couchée, étendue, comme morte, pourrait-on dire.  Jésus la prend par la main. Il fait un acte d’alliance.  Il rompt son isolement. Il la fait sortir de l’écrasement par l’organique, par le biologique, par la fièvre. Il la réveille, il l’éveille et il la relève. Et elle les servait : la voici réintégrée dans la société, à sa place.  Le verbe qui est utilisé ici (εγειρω) pour dire « se réveiller » et « se lever » est le même verbe qui est utilisé pour dire la résurrection de Jésus au matin de Pâques : « Il n’est pas ici, il s’est réveillé, il s’est levé » (Mc 16,6).  Ainsi peut-on dire que la guérison de la belle-mère de Pierre est une figure de la résurrection promise après la mort. Quand Jésus guérit et soulage de la souffrance, c’est déjà le salut de toute souffrance qui est en cours et le salut de la mort elle-même par la résurrection.

L’évangile d’aujourd’hui porte un autre indice encore de ce message de résurrection. Il est dit que Jésus, au petit matin, à la nuit noire, se leva pour prier, pour s’ancrer dans la relation à son Père et s’en nourrir. Et là encore, le verbe qui est employé pour dire « se lever » (ανιστημι) est le même que le verbe utilisé pour dire que Jésus, au matin de Pâques, « s’est levé » du tombeau et est ressuscité par la puissance de Dieu son Père.

Ainsi donc les guérisons que Jésus opère sont des œuvres de compassion, des œuvres de charité, qui combattent la souffrance et, en même temps, figurent le terme de cette délivrance : la résurrection, la vie en abondance, la vie pleinement achevée délivrée de toute souffrance et de la mort elle-même.

C’est là, frères et sœurs, l’essence même du message évangélique. Nous en sommes les porteurs et les témoins comme le dit saint Paul dans la deuxième lecture : « Malheur à moi si je n’annonce pas l’évangile », dit-il (1 Co 9, 16). L’expression ne signifie pas une menace de punition. Mais, littéralement, saint Paul dit : « Quel malheur, ce serait triste pour moi et pour les autres, si je n’annonçais pas l’évangile ! ». Cet évangile est celui de la victoire de Dieu sur toutes les formes de souffrance, sur la mort elle-même. Soyons les bénéficiaires de cette Bonne nouvelle et, à la fois, ses témoins.

Père André Fossion sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Un chant pour accompagner notre méditation

Je suis venu guérir tous les malades

Philippe Goeseels/Grazia Previdi/ADF-Musique

  1. Je suis venu guérir tous les malades,
    Tous les blessés du cœur,
    Pour leur bonheur.
  2. C’est la miséricorde que je désire,
    Est-il meilleur présent
    Pour maintenant ?
  3. Je n’ai pas appelé rien que les justes,
    Mais j’offrirai mon cœur
    A tout pécheur.