Homélie

Frères et sœurs,

Juste avant le passage de l’évangile de ce jour, saint Marc nous a raconté que Jean le Baptiste est venu baptiser dans le désert et qu’il a baptisé Jésus. Celui-ci a reçu la mission de son Père, Dieu l’a engendré par l’Esprit : « Tu es mon Fils bien aimé, il m’a plus de te choisir ». Et aussitôt, dans le récit que nous venons d’entendre, Jésus est au désert, poussé par l’Esprit, pendant quarante jours, parmi les bêtes sauvages, tenté par Satan, nourri par les anges. Aussitôt après, il est en Galilée et proclame : « Le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile ».
C’est bref ! Tout est dit !

Je vous propose trois points de méditation.

D’abord, le désert. « Aussitôt l’Esprit pousse Jésus au désert et, dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan. » Remarquons bien que c’est l’Esprit qui le pousse au désert, Dieu est aux commandes, si je puis dire… et ce n’est vraiment pas rien.
Quelles images du désert avons-nous ? Dans la Bible c’est le lieu de la conversion, que l’on traverse pour être libéré : il y a les quarante ans du peuple de Dieu dans le désert pour passer de la terre d’esclavage à la Terre Promise, les quarante jours de marche d’Elie pour rencontrer Dieu dans la montagne de l’Horeb…  Le désert c’est à la fois le lieu de la fuite et le lieu de la protection… C’est un endroit où règne la mort (les bêtes sauvages) mais aussi un lieu de ressourcement (les anges qui servent Jésus).
Imaginons ce lieu tout en contrastes : qui sont les bêtes sauvages, qui sont les anges ? N’est-ce pas notre humanité où Jésus s’est incarné, où Dieu l’a envoyé ? Un lieu de combat entre vie et mort. Est-ce que nous avons commencé notre Carême en étant poussés comme Jésus par l’Esprit à aller au désert ? Avons-nous peur ? Attendions-nous ce moment ? Et l’Esprit… sommes-nous attentifs à la venue de l’Esprit ? L’attendons-nous vraiment ? Voulons-nous vraiment nous convertir ? Comment ?

Ensuite, le Règne de Dieu. « Après l’arrestation de Jean, Jésus part pour la Galilée proclamer l’Evangile de Dieu, il dit : “Les temps sont accomplis, le règne de Dieu est tout proche.” » Jean a préparé le terrain, sa mission est achevée, c’est maintenant l’œuvre de Jésus. Goûtons cette proclamation de Jésus, la première dans tout l’Evangile de Marc : « Les temps sont accomplis, le règne de Dieu est tout proche ». Jésus attire notre attention, il observe que l’heure est favorable, au terme d’une saison où la terre a germé et développé des fruits de conversion, ceux que Jean a semés. Maintenant que Jean est emprisonné, le règne de Dieu est imminent.

J’ajoute un mot sur la Galilée. C’est un territoire de la Palestine, une entité géographique marquée par la culture grecque, que l’on appelait la Galilée des Nations, carrefour de beaucoup de cultures, lieu de passage. Elle a une valeur symbolique, et reviendra plusieurs fois dans l’Evangile de Marc : elle signifie l’extension au monde entier de la bonne nouvelle adressée au peuple juif. Le chemin de Jésus va le conduire à Jérusalem où il sera mis à mort, mais après sa résurrection il reviendra en Galilée où il appellera ses disciples cf. Mc 16, 7). Depuis le temps de Jésus, ses disciples se sont transmis cette bonne nouvelle et l’ont portée jusqu’à nous, jusqu’à nos contemporains qui n’ont pas encore la joie de la connaître. Nous pouvons imaginer comment nous allons, comme Jésus, nous tourner vers les Galilées d’aujourd’hui, nos Galilées !
Tout à l’heure, en priant le Notre Père, nous aurons une attention toute spéciale à ce Règne de Dieu que nous attendons de tous nos vœux et qui est déjà là !

Enfin, « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile ». L’Evangile c’est la Bonne Nouvelle du Règne de Dieu parmi nous. Mais Jésus invite les hommes et les femmes de son peuple à se convertir. Il devait y avoir des choses à changer dans la vie de ses frères de ses sœurs. N’y en-a-t-il pas aujourd’hui encore dans notre vie personnelle comme dans notre monde ? Jésus nous invite à nous tourner vers la vie, à nous détourner de la mort. Qu’est-ce que cela signifie pour nous aujourd’hui ? En quoi allons-nous répondre à son invitation, à son appel ? Chacun d’entre nous peut s’interroger en vérité.

Père Henri Aubert sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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