Dimanche 3 avril 2022

Cinquième dimanche de Carême (C)

Jean 8, 1-11

Textes de la liturgie (à consulter ici)

  • Isaïe 43, 16-21 : « Je vais désaltérer mon peuple ».
  • Psaume Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous.
  • Philippiens 3, 8-14 : « A cause du Christ, j’ai tout perdu ».
  • Jean 8, 1-11 : « Va, et désormais ne pèche plus. ».

Le Christ et la femme adultère de Nicolas Poussin (1653)
Musée du Louvre à Paris

 

L’homélie

Frères et sœurs,

La liturgie de ce cinquième dimanche ordinaire de l’année C nous donne à méditer un récit évangélique, au scenario difficile à entendre aujourd’hui. Il s’agit d’une réminiscence du livre de lévitique, livre pas facile à lire dans notre contexte et époque, dans un temps où les bonnes nouvelles sont rares. À peine la Covid 19 laisse-t-elle une prospective positive, que la guerre éclate. Simple coïncidence entre le récit que l’évangéliste Jean nous propose et les interprétations des événements actuels : les guerres, les déplacements des populations, les incompréhensions autours d’un certain nombre des accords signés entre les nations ou les organisations ! Il semble difficile dans notre contexte comme dans celui de l’évangile que nous venons d’écouter d’établir la vérité. Qui dit vrai ou qui interprète la Parole en plaçant le projet de Dieu pour l’être humain au centre !

Essayons de nous représenter un peu la scène. Contemplons le lieu où se passe la scène, imaginons-nous Jésus et en face de lui, la foule. Celle-ci est composée d’une femme, des scribes et pharisiens probablement initiateur du piège tendu à Jésus, eux qui aiment surprendre les gens, les coincer dans leur faute et les livrer en spectacles pour les humilier. Chaque personnage est face aux trois autres. D’abord, Jésus est face à la foule (les scribes et pharisiens), à la femme et à la loi, du moins son interprétation patriarcale. Ensuite, la foule est face à Jésus, à la femme et à la loi. Enfin, une femme est conduite à Jésus, placée au milieu de la foule et face à la loi. À y regarder de près, la question de l’interprétation de la loi serait une des préoccupations interpelantes du récit. La manière dont Jésus réagit peut donner à penser et à vivre. Deux points retiennent mon attention.

Le témoignage de Jean présente la situation d’une femme trainée et placée au milieu de la foule. Non seulement elle vit dans une société patriarcale, de grande soumission, mais la voilà aussi vouée à la mort, sa situation est très précaire. Je dirais qu’elle est seule contre tous. Ceux qui l’amènent auprès de Jésus, disent que la loi de Moïse sur l’adultère demande de la lapider. C’est ce que dit la loi de Moïse ? Qu’est-ce qu’un flagrant délit d’adultère ? Nous lisons dans le livre de lévitique : « Quand un homme commet l’adultère avec la femme de son prochain, ils seront mis à mort, l’homme adultère aussi bien que la femme adultère » (Lv 20, 10). Une telle loi nous fait réagir car elle est excessive et cruelle ! Mais si c’est ce que dit la loi de Moïse sur l’infraction « flagrant délit d’adultère », on devrait prendre et lapider les deux, homme et femme, comme la loi le dit. Où est passé l’homme ? Cependant, Jésus refuse une loi qui condamne, qui juge, particulièrement ici la femme mais pas son partenaire. Il s’oppose à sa lapidation. Ce que veut Jésus, c’est le salut de tous, il n’ôte pas la vie mais la donne en abondance. C’est pourquoi il renvoie chacun à sa propre conscience : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre » (Jn 8,7).

Frères et sœurs, sommes-nous loin d’une interprétation à double mesure des événements quotidiens, de nos gestes et paroles ? Est-ce que notre justice surpasse celle des scribes et des pharisiens (Mt 5,20) ? Ne sommes-nous pas dans un monde où tout se mesure et se règle par l’équilibre des forces en présence, un monde préoccupé par l’esprit de domination et de force ? Un monde où tout est prétexte à l’oppression, à la répression, à l’écrasement des faibles, dans leur dignité, à les priver de la jouissance de leurs droits élémentaires. Comme la foule, l’évangile d’aujourd’hui confronte notre vie à Jésus.

Deux fois dans le récit, « Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre ». Je ne sais pas ce que le Christ a tracé sur le sable (Jn 8,6.8). En revanche, cela fait se ressouvenir du doigt de Dieu qui manifestait sa puissance selon certains témoignages de l’Ancien Testament. Par exemple, dans le livre de l’Exode les magiciens égyptiens admettaient qu’à travers l’action d’Aaron, « c’est le doigt de Dieu » qui s’exprimait (Ex 8,15). Puis un peu plus loin, Dieu use de son doigt pour écrire les deux tables de prière où étaient reproduites toutes les paroles que le Seigneur avait prononcées pour le peuple sur la montagne (Dt 9,10). Peut-être que c’est un appel à inscrire l’Écriture dans nos vies, dans nos consciences. En inscrivant la Parole de Dieu non sur le sable mais dans nos vies, nous pouvons nous adresser à chacun et chacune comme à une personne et pas comme à l’objet d’un débat légal. Nous pouvons respecter la dignité humaine, bafouée en maints endroits.

Frères et sœurs un des plus grands dons que Dieu ait fait à l’être humain et qu’il est venu lui rappeler en Jésus-Christ : rien n’est écrit d’avance, rien n’est scellé, rien n’est définitif sur terre, dans les cieux et dans les enfers, rien n’est écrit une fois pour toutes. Jésus nous rassure, lui-même vient de nous tracer la première lettre sur le sable où l’on vient de jeter la femme. Avec la femme de l’évangile, le Seigneur Jésus nous dit : « levons-nous », réincorporons-nous, redisons-nous, réécrivons-nous. Voici une occasion que Dieu nous offre pendant ce temps de carême. La pierre que nous voulions jeter sur les autres pour les lapider, les condamner, déposons-la et prenons le chemin de la vie, de la conscience éclairée par l’Écriture et allons annoncer qu’il est possible de réécrire la vie même là où les circonstances, les malchances, la pandémie, les guerres, les catastrophes naturelles semblent ne plus nous permettre d’écrire notre vocation humaine comme nous l’avions envisagé.

Frères et sœurs, aujourd’hui le Jésus du témoignage de Jean nous renvoie à notre conscience, à la manière dont nous pouvons juger les autres, dont nous interprétons nos lois. Est-ce selon la volonté de Dieu, selon une justice nouvelle ? « Voici que Jésus fait une chose nouvelle : elle germe déjà, ne la voyons-nous pas ? » (Is 43, 19) Que Dieu ouvre nos cœurs et y dépose sa Parole.

Père Mubiala Adolphe s.j.
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Pour accompagner la prière

L’amour a fait les premiers pas

Paroles : Marc Ginot – Musique : Jo Akepsimas

  1. L’amour a fait les premiers pas,
    L’amour a préparé la noce,
    Les invités ne viennent pas,
    L’amour a fait les premiers pas.
    Les places vides sont offertes
    A ceux que l’on n’attendait pas,
    L’amour a fait les premiers pas.
    Il nous adresse la parole,
    Il nous invite à son repas,
    L’amour a fait les premiers pas. (bis)
  2. L’amour a pris la liberté
    De négliger les convenances.
    Il s’est chargé de l’étranger,
    L’amour a pris la liberté.
    Il laisse les brebis fidèles
    Pour celle qui s’est égarée,
    L’amour a pris la liberté.
    Il attendait l’enfant prodigue,
    Il nous invite à le fêter,
    L’amour a pris la liberté. (bis)
  3. L’amour efface le passé,
    Aucun n’osa jeter la pierre
    Et tous les yeux se sont baissés,
    L’amour efface le passé.
    Il a vu l’homme dans sa lèpre,
    Il n’a pas peur de l’embrasser,
    L’amour efface le passé.
    Il nous redonne une autre chance,
    Il nous invite à pardonner,
    L’amour efface le passé.  (bis)
  4. L’amour annonce l’avenir,
    Il fait renaître de la cendre
    La flamme qui allait mourir,
    L’amour annonce l’avenir.
    Il donne jour à l’espérance,
    Il fait renaître le désir,
    L’amour annonce l’avenir.
    Il nous redonne sa confiance,
    Il nous invite à repartir,

L’amour annonce l’avenir.  (bis)