Dimanche 17 juillet 2022

16ème dimanche du temps ordinaire (C)

Textes de la liturgie (à consulter ici)

  • Genèse 18, 1-10 : Aux chênes de Mambré.
  • Ps 14 : Seigneur, qui séjournera sous ta tente.
  • Col 1, 24-28 : Le Christ est parmi vous, lui l’espérance de la gloire !
  • Lc 10, 38-42 : Marthe et Marie.

Sur le chemin
qui va de Marthe vers Marie

 

Le Christ dans la maison de Marthe et Marie – Jan Vermeer 1655
National Gallery of Scotland Edinburgh

Pour lire ce tableau, cliquez ici (un diaporama de “Croire.com”).

On peut aussi lire le tableau de Diego Velazquez 1618
“Le Christ dans la maison de Marthe et Marie”. Cliquez ici (une vidéo de KTO)

L’homélie

Frères et sœurs,

Lorsque saint Luc choisit et décrit les personnages d’un récit, il ne nous perd pas de vue, nous, ses lecteurs : il veille à ce que nous puissions, nous aussi, nous inscrire comme personnage dans l’histoire qu’il raconte. Tentons de découvrir quelle place saint Luc nous réserve au sein du récit de Marthe et Marie

On pourrait, de prime abord, trouver que cette histoire est très simple : deux tempéraments sont en présence, l’un plus enclin à la contemplation et l’autre davantage tourné vers l’action. Il s’agirait de pratiquer l’une et l’autre. Ce serait alors l’idéal monastique : prier et travailler.

Cependant, à y regarder de plus près, on peut constater que c’est vers une toute autre direction que saint Luc veut nous conduire. Les personnages de Marthe et de Marie sont des signes qui renvoient à au-delà d’eux-mêmes. Reprenons donc le fil de cette histoire.

Elle commence par Jésus. Il est sur la route. Il la quitte et entre dans un village. Il demande l’hospitalité. Tout va se jouer autour de cette hospitalité : « Une femme du nom de Marthe l’accueille dans sa maison. Elle a une sœur appelée Marie »

Commence alors ce qui ressemble à une petite parabole.

Deux femmes, qui sont des sœurs, sont présentées en contraste par leur position corporelle et par leur mode de communication.

D’entrée de jeu, Marie est rapidement présentée : « Marie, assise aux pieds du Seigneur, entend sa parole ». Marie est instaurée disciple de Jésus. Elle est assise, en contrebas de celui que le texte appelle le Seigneur. Il enseigne et elle écoute. Marie est à l’école de Jésus et elle reçoit sa parole comme un don. On ne nous dit pas le contenu de cette parole. Comme si seule l’écoute comptait. Marie accueille en écoutant.

Marie a reconnu, dans l’hôte reçu dans la maison, le « Seigneur», l’Envoyé. Elle l’accueillir en s’ajustant à lui.

En face de Marie, il y a Marthe. Son comportement corporel est plutôt, ici, de l’ordre du mouvement et sa communication est nettement du côté du « dire » plutôt que de l’« entendre ».

« Elle est tiraillée, dit littéralement le texte, autour de tant à servir ». Voilà une autre manière, louable en soi, d’accueillir, par exemple, un visiteur étranger venu demander le gîte et le couvert.  C’est ainsi que Marthe voit le « Seigneur » : elle reconnait en lui un hôte de passage. Son regard est à l’opposé de celui de Marie. Donc, très logiquement, du point de vue de Marthe, l’attitude de Marie est incompréhensible et elle le fait savoir à Jésus : d’abord par une admonestation: « Cela ne te soucie pas que ma sœur me laisse seule ? » et ensuite par une injonction : « Dis-lui donc de m’aider ».

Cet acte de parole est de nature à provoquer une triple rupture. Entre elle-même et Jésus qu’elle agresse, entre Marie et Jésus dont elle veut la séparation et entre elle et sa sœur qu’elle veut récupérer à son service.

Luc nous fait lire, en filigrane dans ces paroles, une figure du « diviseur».

Mais la réponse de Jésus à Marthe substitue l’alliance à la division.

Tout commence par deux mots qui constitue un appel porteur de tendresse. A deux reprises, il prononce son nom : « Marthe, Marthe ». Jésus fait à Marthe le don de son alliance.

Ensuite, Jésus la libère de son repli sur elle-même et de son enfermement dans la multiplicité des tâches où elle se perd : « Tu t’inquiètes et tu te mets en tumulte pour beaucoup de choses ».

Enfin, Jésus invite Marthe à rejoindre sa sœur, à faire le chemin qui conduit à Marie. C’est le chemin de l’alliance fraternelle: « Marie, lui dit-il, a choisi la bonne part[1] ». Il dit aussi que c’est « la seule dont il est besoin ». Quelle est donc cette part si nécessaire ?

La réponse est là, donnée immédiatement dans le texte, si nous voulons bien l’entendre : « Elle ne lui sera pas enlevée ». La bonne part, c’est celle qui est donnée et jamais enlevée !  Ce qui jamais ne sera enlevé, c’est la vie éternelle.

Jésus qui entre dans le village, dans la maison, dans le cœur de Marthe et de Marie, c’est Jésus qui va à la rencontre de l’humanité pour lui offrir le Salut.

La maison de Marthe et de Marie figure la maison humaine à la fraternité divisée, en attente d’alliances. Marie et Marthe, c’est l’humanité que Dieu ne cesse de sauver.

Marthe est en chemin. En chemin de fraternité humaine. En chemin de reconnaissance et d’alliance avec le Dieu qui aime.

Et nous ? Saint Luc a-t-il réussi à nous inscrire dans son récit ?

Oui, quelque part sur le chemin qui va de Marthe vers Marie.

Père Jean-Paul Laurent  sj

Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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[1] Plusieurs traductions disent, erronément, « la meilleure part », dotant ainsi Marie d’un sentiment de rivalité.

Pour accompagner la prière

Comme un souffle fragile

Paroles : Pierre Jacob  – Musique : Gaëtan de Courrèges

Comme un souffle fragile,
Ta parole se donne
Comme un vase d’argile,
Ton amour nous façonne.

  1. Ta parole est murmure,
    Comme un secret d’amour,
    Ta parole est blessure
    Qui nous ouvre le jour.
  2. Ta parole est naissance,
    Comme on sort de prison,
    Ta parole est semence
    Qui promet la moisson.
  3. Ta parole est partage
    Comme on coupe du pain,
    Ta parole est passage
    Qui nous dit un chemin.