Dimanche 21 mai 2023

7ème  dimanche de Pâques (A)

Lectures

  • Actes 1, 12-14 : Tous d’un même cœur, ils étaient assidus à la prière.
  • Psaume 26 : J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants.
  • 1 Pierre 4, 13-16 : Vous communiez aux souffrances du Christ.
  • Jean 17, 1b-11a : J’ai manifesté ton nom aux hommes…

Lire les textes de la liturgie

Père, Glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie

 

Christ de l’église St-Gervais-St-Protais de Pavie (Italie)

L’homélie

Frères et sœurs,

Dans l’évangile de ce dimanche, il est beaucoup question de « gloire ». N’est-ce pas surprenant que Jésus, dans cette prière particulièrement solennelle, supplie d’être glorifié ? C’est surprenant si on donne au mot « gloire » une définition erronée.

L’ambigüité du concept se retrouve dans les mots utilisés du temps de Jésus pour désigner la gloire.

En grec (qui était la langue internationale de l’époque, et qui est la langue dans laquelle Jean a écrit son évangile), doxa est l’opinion que l’on se fait de quelqu’un, l’estime portée à une personne de réputation (dokéin signifie « juger », « estimer »). Ce mot grec de « gloire » s’inscrit dans le registre de la lumière et de l’éclat.

Avec de telles connotations du mot « gloire », je cours le risque de penser à ces festivals de cinéma, où on met en lumière ce qui est le plus superficiel, à grand renfort de projecteurs. Je peux aussi imaginer le joueur de football s’adressant à Dieu, en montant sur le terrain : « Fais, Seigneur, que mon équipe gagne, mais surtout que je marque le but décisif ! Si possible que cela se produise dans les arrêts de jeu, pour que tout le monde m’applaudisse et, pour que ce soit repris dans tous les flashs d’info de la fin du week-end ! »

Nous devinons que tout cela est bien éloigné de ce que vit Jésus.

Dans la langue hébraïque, la connotation du mot « gloire » est différente. En hébreu, la gloire ne relève pas de l’éclat lumineux mais souligne le poids objectif des êtres. Kâbod signifie en effet « poids ». Ainsi on n’est plus du tout dans la superficialité, mais bien dans la densité : comme l’or a une densité (et donc une valeur) bien plus grande que le cuivre ou l’aluminium. La densité ou le poids de l’être appartient à Dieu seul, à tel point que certaines manifestations divines sont littéralement écrasantes.

Quand Jésus prie, nous sommes quelques heures avant son arrestation, sa condamnation, sa mise en croix, sa mort dans l’obscurité ! Le contexte est donc celui de l’anti-vanité ! Ce qui révèle le Fils de Dieu de manière suprême, ce n’est pas un but marqué dans les arrêts de jeu, ce ne sont pas non plus des jeux de lumière sur des vêtements à paillettes. C’est dans l’absence complète de paillettes, que le poids du Fils de Dieu se révèle. Lorsqu’il n’y a plus rien d’autre à voir qu’un corps nu, martyrisé, cloué sur une croix !

Et ce n’est pas tout ! Dans sa prière, Jésus dit : « Père, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie ».
Ce n’est pas que Jésus Christ, dont le poids ou la densité se révèle dans ce dénuement, mais c’est Dieu le Père lui-même qui révèle la densité de son être dans le mystère de la croix.

Cet échange de gloire est au cœur de la Trinité ! Il y a valeur, densité et poids en Dieu, parce que Dieu est relation. Humainement nous pourrions penser que la gloire comprise comme gloriole est une donnée individuelle, qui met l’individu atomique en valeur : c’est vers lui et rien que lui qu’on se retourne ; c’est lui et rien que lui qu’on applaudit !

Quand il est question de « gloire divine », le poids et la valeur sont liées à un échange. Le Père glorifie le Fils, le Fils glorifie le Père. Autrement dit, la gloire est quelque chose qui est reçu et donné à la fois ! Cela fait partie de la densité de l’être glorieux : non par et pour lui-même, mais en relation, en recevant de l’autre et en donnant à l’autre.

Nous découvrons dans ces extraits d’évangile qu’en Dieu ils sont Trois, Trois à donner et à recevoir l’amour, et que la pression de l’amour trinitaire ne vise pas ni à capter ni à écraser mais à étreindre, à embrasser.

Et pour moi ? Qu’est-ce que la gloire pour moi ? Où est-ce que je mets ma fierté ? Est-ce dans la superficialité de ce qui capte le regard momentanément ? Ou bien est-ce dans la densité de mon être, là où je sais que je donne le meilleur de moi-même, justement parce que je donne ce que j’ai reçu moi-même ? C’est souvent dans les gestes les plus humbles que je sais que la valeur se vit davantage. Ces gestes sont tellement humbles, voire discrets, que peu de personnes les ont remarqués, mais moi je sais que j’en vis ! Je mesure combien cela est intense et dense !

Je résume :

La gloire n’est pas dans la superficialité des éclats de lumière ou des coups d’éclats ; la gloire est dans la densité des personnes.

C’est une densité relationnelle : densité des personnes qui se donnent les unes aux autres et se reçoivent les unes des autres.

Nous-mêmes pouvons participer de cette gloire trinitaire, quand nous louons Dieu et servons nos frères et sœurs.

Père Thierry Dobbelstein sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Un chant pour accompagner notre méditation

Jésus, tu montes aux cieux

Texte : Jean-Pascal Hervy, Musique : Philippe Robert, ADF Musique

Stance : Pourquoi regardez vers le ciel ?
Jésus le crucifié est vraiment ressuscité. Alléluia !
Comme il est parti, il reviendra
Et nous entrerons dans la joie de son Père ! Alléluia !

Refrain :
Jésus, tu montes aux cieux,
parmi nos chants de joie !
Tu n’es plus devant nos yeux
mais nous savons que tu es là ! Alléluia !

  1. Cette gloire sans prix de l’héritage
    Reçue de Dieu par Jésus-Christ
    Sera déployée tel un partage
    Parmi ceux qui vivent de l’Esprit.
  2. Cette gloire sans prix de son alliance
    Reçue de Dieu par Jésus-Christ
    Viendra justifier une espérance
    Dans l’Église unie par son Esprit.