Dimanche 24 janvier 2021
Troisième semaine du temps ordinaire
Textes de la liturgie (à consulter ici)
- Jonas 3, 1-5.10 : Lève-toi, va à Ninive
- Psaume 24 : Seigneur, enseigne-moi tes chemins
- 1 Corinthiens 7, 29-31
- Marc 1, 14-20 : Je vous ferai devenir prêcheurs d’hommes
Voir la vidéo de l’évangile et de l’homélie sur youtube
L’homélie
Permettez-moi de vous raconter une petite histoire qui m’a fort touché et rejoint les lectures d’aujourd’hui.
Il s’agit d’un jeune garçon de 18 ans nommé Raju qui est entré à l’école d’ingénieurs où je travaillais il y a trois ans. C’était le début de ses études. Il y avait quelque chose d’étrange que j’ai remarqué en lui. Jour après jour, il passait du temps seul, souvent sur la terrasse de l’internat, profondément plongé dans ses pensées et visiblement préoccupé. Je l’ai appelé pour lui parler. Même si cela a pris du temps, il m’a fait confiance. Il songeait souvent à sauter du troisième étage pour se suicider. Raison – il ne voulait pas étudier l’ingénierie… mais au-delà de cela, il ne se sentait pas accepté par son père avec qui il ne pouvait pas partager tout ce qu’il traversait. Le lendemain, j’ai appelé son père et je lui ai
expliqué l’impasse dans lequel son fils se trouvait. J’ai demandé à Raju aussi qu’il vienne parler à son Père. Et à ce moment-là, le père a parlé avec les larmes aux yeux. Il a pris conscience qu’il était dur avec son enfant, ce que ne permettait pas à Raju de lui parler librement. Ensuite il a expliqué à quel point il l’aimait et à quel point il voulait qu’il réussisse dans ses études. Raju commence à s’étonner, à se réjouir parce qu’il n’a jamais entendu son Père parler ainsi. L’histoire se termine quelques jours plus tard quand il a quitté ses études, rejoint une autre université. Il m’a appelé plus tard pour me remercier mais aussi pour dire à quel point les paroles de son Père ont bouleversé sa vie. Un changement brusque et une transformation joyeuse.
Les lectures d’aujourd’hui me rappellent cette belle histoire et font vibrer mon cœur. Nous venons d’entendre deux rencontres décisives qui se déroulent la première entre Jonas et les Ninivites et la seconde entre Jésus et les futurs apôtres. Dans chacune de ces rencontres, on voit combien les paroles lancées ont eu un effet bouleversant sur la vie des destinataires. On voit dans les deux cas un appel urgent et une réponse tout aussi spontanée. Nous voyons un changement de chemin, un renoncement à leur passé mais aussi un retournement vers un avenir prometteur.
Encore quarante jours, et Ninive sera détruite. Ce sont des paroles du Seigneur qui sortent de la bouche de Jonas sous forme d’un cri d’alarme. Un avertissement. Jonas a été conduit par Dieu de manière dramatique depuis la terre d’Israël vers l’immense ville païenne de Ninive pour annoncer le châtiment de Dieu et pour les appeler à la conversion. Evidemment, il avait peur que sa prophétie pèse sur sa vie. Le résultat – quelque chose à quoi il ne s’était pas attendu – les habitants de Ninive, loin de réagir contre lui, l’écoutaient, croyaient en Dieu, se repentaient et se détournaient de leur mauvaise conduite. Quel bouleversement ! Quel changement de chemin !
Nous voyons ici deux mouvements dans le comportement des Ninivites. Croire et se détourner. D’ailleurs, c’est la même prédication de Jésus que nous entendons dans l’Evangile d’aujourd’hui. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. Deux leçons peuvent être tirées de cet appel. Premièrement, il s’agit de l’ouverture d’esprit à écouter l’appel de Dieu. Dieu nous parle aujourd’hui, ici et maintenant, dans notre vie quotidienne à travers différentes personnes, des événements ou des signes. Il faut un esprit attentif pour discerner son appel. Et l’appel de Dieu n’est pas dans le vide. Cela touche le cœur de notre conscience. Il suscite un mouvement intérieur. Il incite nos cœurs à rejeter tout ce qui est mal en nous et à embrasser ce qui nous conduit vers Dieu, ce qui nous conduit à mieux aimer notre prochain, ce qui donne sens à notre vie. Et deuxièmement, c’est un appel à découvrir la vraie conversion chrétienne. Il ne s’agit pas seulement de s’abstenir de tel ou tel acte mais de prendre conscience que nous sommes acceptés par Dieu tels que nous sommes. Il s’agit d’allumer en nous l’étincelle de confiance dans la miséricorde de Dieu, toujours gratuite et sans condition.
Passons à la deuxième rencontre entre Jésus et les apôtres. Venez derrière moi. Je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes. Ce sont des paroles adressées par Jésus aux pêcheurs Simon, André, Jacques et Jean. Comme lors de la rencontre précédente entre Jonas et les Ninivites, il y a un appel et une réponse. L’initiative vient toujours de Dieu. Mais, les critères de son choix restent mystérieux. Cela nous échappe parce que notre logique nous dit de choisir les meilleurs et les plus talentueux. Mais une fois l’appel lancé, Dieu attend une réponse. Les disciples, en entendant l’appel de Jésus, répondent sans hésitation. Aussitôt, laissant leurs filets ils le suivirent. Ici encore, nous voyons un bouleversement dans leur vie. Un changement de chemin. Jusqu’à présent, ils se sont concentrés sur leurs barques, leurs filets, leurs pêches, leurs familles et leurs moyens de subsistance. Mais maintenant, en acceptant de suivre Jésus et de devenir les pêcheurs d’hommes, ils se mettent avec Jésus et à la disposition des autres.
Il en va de même pour nous aujourd’hui. Dieu nous rejoint dans notre vie quotidienne, dans nos familles et dans notre travail pour lancer un appel – un appel à le suivre mais aussi un appel à être pêcheurs d’hommes. Devenir pêcheurs d’hommes, pour nous, c’est élargir notre horizon de relation avec les autres. C’est un appel à être moins égocentrique et à oser tisser des liens. C’est être les messagers de la bienveillance et de la miséricorde de Dieu envers les autres. Tout ce dont nous avons besoin, c’est de laisser nos filets pour être mieux disponible. A nous de réfléchir quel genre de filets nous devrons laisser pour pouvoir créer les liens de bienveillance et d’amour autour de nous. Être disciples exige un changement de chemin.
Pour terminer, pensons aux belles paroles de Jean Paul II adressées aux jeunes lors de la journée mondiale de la jeunesse 94 – 95 : Chers amis, laissez-vous séduire par le Christ ; accueillez son invitation à le suivre. Allez et annoncez la Bonne Nouvelle qui rachète ; faites-le avec joie au cœur et devenez des communicateurs d’espérance et de foi. AMEN.
Père Thomas Madanu sj
Chapelle universitaire Notre-Dame de la Paix
Un chant pour accompagner la prière:
Venez, Dieu nous appelle
Paroles : Benoît Gschwind – Musique : Bertrand Bayl
R. Venez, Dieu nous appelle, sa Parole nous rassemble.
Venez, c’est jour de fête ; entrez, Dieu nous attend.
1. Entrez, entrez avec confiance, la table déjà est préparée…
Peuple de Dieu marqué par son passage,
Dieu nous attend avec patience pour être son Église.
2. Entrez, entrez dans le silence, la table déjà est préparée…
Peuple de Dieu, d’exode en exode,
Dieu nous attend avec patience pour être son Église.
3. Entrez, entrez dans l’espérance, la table déjà est préparée…
Peuple de Dieu vivant de l’Évangile,
Dieu nous attend avec patience pour être son Église.