Dimanche 17 mars 2024

Cinquième dimanche de Carême (B)

Lectures

  • Jérémie 31, 31-44 : Je serai leur Dieu et ils seront mon peuple.
  • Psaume 50 : Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu.
  • Hébreux 5, 7-9 : Le Christ apprit par ses souffrances l’obéissance.
  • Jean 3, 14-21 : Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive.

Lire les textes de la liturgie

Père, sauve-moi de cette heure ?

 

 

 

Homélie

Frères et soeurs

Le thème des lectures d’aujourd’hui, même si cela ne vous a peut-être pas sauté aux yeux, c’est l’espérance, et même, l’espérance contre toute espérance.

L’espérance tout court d’abord, avec les mots de la première lecture où Dieu annonce une alliance nouvelle, une alliance qui ne vient pas de l’extérieur, mais qui se noue à l’intérieur même de notre cœur : « Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes, je l’inscrirai sur leur cœur (et plus sur la pierre). Je serai leur Dieu et ils seront mon Peuple. » Autrement dit, la Loi d’Amour du Seigneur ne vient plus d’une parole qui descend du ciel et qui s’impose dans les éclairs et le tonnerre, comme au Sinaï, mais elle s’écrit sur notre cœur lui-même, comme la présence et la parole de Dieu au cœur de nous-mêmes, rejoignant notre être et notre désir le plus profond. La Loi que le Dieu créateur nous donne dans son alliance n’est rien d’autre que la Loi de la vie divine en nous, la Loi de la vie qui est nôtre, tels que nous sommes créés.

C’est comme si Dieu nous donnait le mode d’emploi de notre propre vie, le mode d’emploi de ce que nous sommes et de ce pour quoi nous sommes faits. La Loi divine met en mots le dynamisme même de ce que nous sommes, le mode d’emploi de notre vie à construire et à faire grandir. Quelle promesse, quelle espérance ! « Tous me connaîtront, des plus petits au plus grands » car tous participent et sont animés de la même vie originelle, cette vie de Dieu que Dieu nous donne et dont il nous donne la clé. Voilà la nouvelle alliance. Dieu inscrit sur nos cœurs sa Parole de vie en sorte que cette vie ne nous fasse jamais défaut. Et si nous descendons dans cette profondeur de nous-mêmes, c’est elle que, toujours, nous découvrirons. Que nous faut-il de plus ?

Pourtant, tout cela est ébranlé et mis en doute par toutes les épreuves de la vie, les souffrances, les maladies, et finalement par la mort. Que vaut cette alliance, que vaut cette promesse si, de toute façon, la vie continue de nous éprouver, si, de toute façon, les maladies continuent de nous frapper, et si, de toute façon, la mort a toujours le dernier mot ? Que valent toutes les promesses de Dieu face à cela ?

C’est là qu’il nous faut lire la seconde lecture attentivement : « Le Christ, pendant les jours de sa vie dans la chair, offrit, avec un grand cri et dans les larmes, des prières et des supplications à Dieu qui pouvait le sauver de la mort, et il fut exaucé ! »

Remarquons d’abord le sérieux de la situation : « Dans un grand cri, avec des larmes, des prières et des supplications. » Ce à quoi le Christ est confronté, la souffrance qu’il affronte, ce n’est pas pour rire, ce n’est pas du pipeau. A Gethsémani, c’est l’angoisse et les larmes de sang. Le Christ éprouve donc dans sa chair la réalité de la souffrance, de toute souffrance humaine, il n’est pas épargné, il ne passe pas à côté. Et voilà que l’auteur de la lettre aux Hébreux ajoute tranquillement : « Et il fut exaucé par Dieu qui pouvait le sauver de la mort. »

Mais est-ce vrai ? Jésus a-t-il échappé à sa passion, à la croix, à la mort ? Non ! Alors que veut dire pour lui être sauvé par Dieu dans ce cas ? Et que veut dire pour nous que le Christ nous sauve à notre tour alors que ni la souffrance, ni la maladie, ni la mort ne nous seront épargnées non plus ? Que veut dire être sauvé ?

Une réponse trop rapide pourrait être de dire que le salut, c’est après. Que souffrance et mort sont des mauvais moments à passer pour obtenir, après, le salut, la délivrance. Ce serait une sorte de prix à payer pour recevoir, après, le salut… Mais est-ce vraiment cela qu’être sauvé veut dire ?

La signification la plus profonde du salut, que vit et que révèle Jésus-Christ dans sa passion et dans sa mort, et dont nous pouvons à notre tour expérimenter la réalité, c’est que, quand la maladie, la souffrance et la mort nous font tout ce qu’elles peuvent nous faire – et elles peuvent beaucoup ! – nous découvrons que nous ne sommes pas anéantis, que nous ne sommes pas réduits à néant, que nous ne sommes pas détruits totalement. En nous et de nous demeure, inébranlable, la part divine, la part créée par Dieu, sa vie donnée et qui ne peut être ni reprise, ni détruite, d’aucune manière. Ce lieu de vie, ce lieu d’alliance que Dieu inscrit en nous, demeure à travers tout, et ne cesse jamais de nous donner à nous-mêmes, de nous donner d’être vivants en Dieu et par Dieu. Voilà notre salut !

Si, à vue humaine, la maladie et la mort ont toujours le dernier mot, dans la foi, nous découvrons une autre réalité. Dans ces moments où toutes nos assurances vacillent, quelque chose tient bon, quelque chose demeure et sauve, dont le Christ témoigne et dont nous éprouverons nous-mêmes, en ces instants-là, la vérité. C’est pourquoi Jésus peut s’écrier dans l’Évangile : « Que vais-je dire ? Père, sauve-moi de cette heure ? Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! Père, glorifie ton nom ! »

Et la gloire de Dieu se dit, non dans la suppression de la condition humaine, comme si la souffrance, la maladie et la mort pouvaient disparaître d’un coup de baguette magique, mais dans le fait qu’au cœur de tout cela, quand tout cela se déchaîne et semble l’emporter, sa présence, sa vie, son amour, ne cessent de se donner et de tenir, jusqu’au bout, jusqu’à se manifester, toute condition humaine assumée, dans la résurrection.

Oui, quand la mort a fait tout ce qu’elle peut nous faire, ce qui reste est ce qui, de nous, vient de Dieu. Quelle espérance, est donc la nôtre ! Et comment pourrions-nous craindre quoi que ce soit dans la vie, si Dieu lui-même, comme Jésus en témoigne, ne cesse de nous sauver ?

Amen.

Père Paul Malvaux sj

Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Un chant pour accompagner notre méditation

Grain de Blé

Communauté du Chemin Neuf

  1. Grain de blé qui tombe en terre,
    Si tu ne meurs pas,
    Tu resteras solitaire,
    Ne germeras pas.
  2. Qui à Jésus s’abandonne
    Trouve la vraie Vie
    Heureux l’homme qui se donne,
    Il sera béni.