Dimanche 30 janvier 2022
Quatrième dimanche ordinaire (C)

 Jésus est venu pour tous

Textes de la liturgie (à consulter ici)

  • Jérémie 1, 4-5.17-19 : Je t’ai consacré, j’ai fait de toi un prophète pour les nations.
  • Psaume 70 : Sans fin je proclamerai ta justice et on salut.
  • 1Corinthiens 12, 31-13, 13 : L’amour ne passera jamais.
  • Luc 4, 21-30 : Aujourd’hui s’accomplit le passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre.

Fresque de la basilique
di Santa Caterina d’Alessandria, Galatina (Italie)

L’homélie

L’évocation du geste d’Elie et d’Élisée : une Parole qui provoque et dévoile l’ambiguïté de l’accueil.

Dimanche dernier, l’évangile de Luc présentait Jésus à Nazareth où a eu lieu son discours-programme lors d’une liturgie synagogale. La première partie du texte était centrée sur l’accomplissement en Jésus de la prophétie d’Isaïe (Lc 14, 16-22). Aujourd’hui l’évangéliste nous renvoie plus loin encore dans la tradition prophétique.  A travers deux représentants authentiques du prophétisme : les prophètes rejetés de leur patrie, les chefs de file des pauvres, des opprimés, des étrangers dont la libération fut annoncée par Isaïe (Is 61).

Les trois prophètes qui ont précédé Jésus, à travers le discours inaugural lucanien, nous aident à comprendre la mission de Jésus et son destin qui se précisera plus tard : « Il ne convient pas qu’un prophète périsse hors de Jérusalem » (Lc 13,33).

Revenons sur le second temps du discours de Jésus à Nazareth. Nous pouvons être frappés par quelques paroles pas faciles à comprendre : d’abord ce qui est qualifié de « discours inaugural » porte en son sein ce passage qui fait comprendre que Jésus n’en est pas à sa première apparition publique : « Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm : fais donc de même ici dans ton pays ! » (v. 23) Puis, ce changement brusque d’attitude de l’assistance : elle passe de l’admiration – « tous Lui rendaient témoignage et s’étonnaient des paroles de la grâce qui sortaient hors de sa bouche » (v. 22) – à la fureur : « ils furent remplis tous de fureur dans la synagogue… ils le jetèrent dehors » (vv. 28-29).

Contemplons ce que la seconde partie du discours peut nous laisser déjà deviner : deux dimensions à l’intérieur de l’histoire du salut, deux avenirs lointains.

La première est la portée universelle de la Parole. Cette Parole qui résonne à nos oreilles est pour nous-même, mais elle révèle aussi son caractère dynamique. Car elle fait éclater nos attentes, brise les barrières et va plus loin vers les pauvres, les faibles, les opprimés. Finalement, elle est à la fois pour nous et pour les autres.

La seconde est le caractère scandaleux, provocateur de cette Parole : l’annonce par Jésus des gestes annonciateurs qui sont les miracles d’Elie et d’Élisée en faveur d’étrangers (Lc 4, 25-27 ; cf. 1R 17, 7-24 et 2R 5, 1-27) est aussi source de l’opposition meurtrière rencontrée et surmontée mystérieusement par Jésus. Dans la synagogue de Nazareth se trouvent essentiellement les gens de la patrie de Jésus, du peuple d’Israël, ceux qui connaissent Jésus comme le « fils de Joseph », le fils du pays, l’un des leurs. Et pourtant Jésus parle des miracles d’Elie et d’Élisée, envoyés aux étrangers. Voici la Parole qui provoque, qui irrite, fait grincer les dents et fait naître l’opposition. Ainsi, l’assistance d’abord admirative, devient menaçante. Pour les contemporains de Jésus, c’est exclusivement le peuple d’Israël le vrai bénéficiaire du « Royaume de Dieu ». Et voici que non seulement Jésus va à contre-courant, mais aussi qu’Il est « signe de contradiction » comme l’avait annoncé Syméon (Lc 2, 34). Ce qu’il dit : les étrangers sont aussi les véritables bénéficiaires de la Parole de grâce.

Cette Parole de la grâce rejaillit aussi sur l’avenir. Elle est encore d’actualité pour nous. De même que les apôtres ont continué la mission prophétique de Jésus, rendre présente la Parole, nous sommes nous aussi appelés à apporter un témoignage indispensable sur la portée universelle de cette mission du Christ. Prophètes, apôtres, chrétiens d’aujourd’hui, tous devraient permettre de saisir dans toutes ses dimensions la Parole et faire en sorte qu’elle puisse prendre corps dans notre monde. Oui dans un monde où l’étranger peut apparaître comme menaçant, où l’immigration comme sujet est au cœur des furieuses réactions et crée les changements de « stratégie », la Parole de la grâce a toute sa place.

Comme l’assistance dans la synagogue de Nazareth, parfois nous voulons que les paroles de la grâce, les dons reçus, soient seulement à nôtre profit. Ne sommes-nous pas tentés par le démon de la mise à l’écart des autres, de l’égoïsme, de l’abondance, de l’accaparement des biens ! Nos réactions ne sont-elles pas plein d’ambiguïté aux sujets de l’immigration, de la pandémie, de la synodalité, de la guerre, de la dégradation climatique ! Aujourd’hui, Jésus démasque les ambiguïtés de nos réactions, de nos gestes et paroles, de nos relations. Il dévoile nos attitudes qui consistent à tenter de ramener la Parole de vie à nos « lieux d’origine » d’abord, nos cercles fermés, nos « confinements intérieurs » !

Saint Paul nous rappelle : « Tu auras beau distribuer toute ta fortune aux affamés, tu auras beau te faire brûler vif, s’il te manque l’amour, cela ne sert à rien » (1 Co 13, 3). C’est à chacun et chacune de partager la bienveillance de Dieu à tous et à toutes.

Père Adolphe Mubiala s.j.
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Pour accompagner la prière

A l’image de ton amour

Paroles : Jean-Paul Lécot – Musique : Jean-Paul Lécot et Sébastien Temple

Seigneur Jésus, tu nous as dit :
« Je vous laisse un commandement nouveau :
Mes amis, aimez-vous les uns les autres,
Écoutez mes paroles et vous vivrez. »

Devant la haine, le mépris, la guerre,
Devant les injustices, les détresses
Au milieu de notre indifférence,
Ô Jésus, rappelle-nous ta Parole.

Fais-nous semer ton évangile,
Fais de nous des artisans d’unité,
Fais de nous des témoins de ton pardon,
A l’image de ton Amour.

Tu as versé ton sang sur une croix,
Pour tous les hommes de toutes les races,
Apprends-nous à nous réconcilier,
Car nous sommes tous enfants d’un même Père.

Fais-nous semer ton évangile,
Fais de nous des artisans d’unité,
Fais de nous des témoins de ton pardon,
A l’image de ton Amour.