Mardi 24 décembre 2024
Nuit de Noël
Lectures
- Isaïe 9, 1-6 : Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière.
- Psaume 95 : Aujourd’hui, un Sauveur nous est né, c’est le Christ, le Seigneur.
- Tite 2, 11-14 : La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes.
- Luc 2, 1-14 : Dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur.
Lire les textes de la liturgie
Ne craignez pas, n’ayez pas peur!
La crèche de la Chapelle Universitaire N-D de la Paix à Namur
Homélie
Frères et sœurs,
Mettons-nous un peu une seconde à la place du conseiller en communication de Dieu le Père. Quel serait notre conseil pour le faire connaître au monde avec le maximum d’efficacité ? Probablement lui dirions-nous de choisir, pour se montrer, le lieu avec le plus de visibilité et d’impact, quelque part à proximité de la ville la plus puissante du monde, parmi les gens les plus influents et les plus connus et de se manifester avec la plus grande puissance pour que personne ne puisse douter de lui et que les foules soient obligées d’y croire et de le suivre. Maximum de visibilité, maximum de puissance, maximum d’impact…
Or, notre Dieu, Jésus, fait exactement le contraire. Il choisit un peuple obscur du Proche-Orient sous domination étrangère, il choisit la famille d’un ouvrier charpentier inconnu au bataillon, et, pour lieu de naissance, un village étape et une mangeoire parce qu’il n’y a plus de place à la salle commune. Et pour annoncer la nouvelle, il choisit des bergers, réputés pour être grossiers, malhonnêtes et voleurs. Avouez qu’il y a de quoi être perplexe. Notre Dieu fait tout le contraire de ce qu’il faudrait ! Mais pourquoi ? A votre avis, pourquoi fait-il ainsi ?
La réponse est toute simple. Regardons la réaction des bergers quand la gloire de Dieu leur apparaît dans toute sa splendeur ? Ils sont saisis d’une grande crainte, ils sont terrorisés. Et qui ne le serait pas à leur place ? Or, Dieu ne veut pas inspirer la crainte, il ne veut pas qu’on ait peur de lui. Il vient pour nous sauver, pour nous remettre debout, pour nous rendre notre dignité. Pas pour nous faire sentir sa puissance ou s’imposer à nous par la crainte. Pas pour nous forcer à croire en lui ou nous obliger en nous menaçant des châtiments de l’enfer. La première parole de l’ange, tant à Marie qu’aux bergers, c’est « Ne crains pas, n’ayez pas peur ». C’est le salut qui vient, pas la condamnation. C’est la lumière qui vient, l’absolue douceur de l’amour de Dieu. En elle, nulle peur, nulle menace, nulle ambiguïté, nul double discours, nul oui, mais… Non, uniquement et exclusivement, une main tendue, qui appelle, qui invite, qui aime et qui sauve. Voilà la gloire de Dieu qui se manifeste à Noël, dans l’enfant Jésus, et qui se montre aux bergers tout ébahis. Et en effet, qui pourrait avoir peur d’un enfant dans la paille d’une étable perdue au milieu de nulle part ?
Et pourtant. Pourtant, depuis Adam, c’est-à-dire, depuis le presque tout début, l’homme et la femme ont peur de Dieu. Ils se cachent de lui, ils ont honte d’eux-mêmes et craignent un jugement, une punition, une vengeance divine pour ce qu’ils ont fait. Au cœur de l’être humain, se cache une peur secrète, une peur sourde, de Dieu. Est-il vraiment aussi bon qu’on le dit ? Sa justice ne risque-t-elle pas de se déchaîner devant ce que l’humanité fait de sa création ? Ne va-t-il pas renvoyer son déluge comme autrefois pour tout effacer et recommencer ? Méritons-nous vraiment sa bonté et sa patience ?
Pensons un instant à la première impression qui nous vient, à notre première réaction, si on imagine Dieu qui nous regarde, qui regarde notre vie et qui passe tout en revue. N’y aurait-il pas une légère appréhension, une petite crainte, un petit doute ? Qu’est-ce que Dieu pense de nous, finalement, que nous veut-il ?
Voilà pourquoi quand Dieu s’incarne, quand Dieu vient nous visiter (il y a deux mille ans comme aujourd’hui encore), il vient d’abord comme un petit enfant, dépendant, vulnérable, fragile, à notre merci. Dieu ne veut pas nous faire peur ou nous effrayer. Il ne veut pas nous obliger ou s’imposer. Il désire susciter de notre part une confiance, un désir en retour, une réponse libre, un amour qui nous donne de l’accueillir à bras ouvert, de lui ouvrir notre porte, pour qu’il puisse faire sa demeure en nous et accomplir son œuvre de salut. Qu’allons-nous répondre aujourd’hui à cette bonne nouvelle ? A cet enfant qui veut naître aussi pour nous ? A ce Dieu qui veut, aujourd’hui, demeurer chez nous ? Qui frappe à notre porte ?
Dans nos vies quotidiennes, nous agissons si souvent animés par la peur. Combien de nos décisions sont guidées secrètement par une peur ? Que va-t-on penser de moi ? Que va-t-il m’arriver si ? Qu’est-ce que je risque si ? Comment me protéger ? Dieu veut libérer nos vies de la peur. Et pour cela, il se présente à nous comme un enfant, comme un nouveau-né qui ne demande qu’à être accueilli, mais qui ne peut ni forcer, ni obliger.
Entendons ce soir l’ange nous dire, comme à Marie à l’annonciation, comme aux bergers à Noël, comme aux apôtres après la résurrection : « Ne craignez pas, n’ayez pas peur ! » Et ouvrons grands nos cœurs et nos esprits à la venue de Jésus, source de toute paix et de toute joie. Nous n’avons rien à craindre, il ne nous veut que du bien. Son nom est Emmanuel, Dieu avec nous, son nom est Jésus, notre sauveur. Aujourd’hui. Amen.
Père Paul Malvaux sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur