Dimanche 25 décembre 2022

Solennité de la Nativité du Seigneur (A)

Messe de la nuit

  • Isaïe 9, 1-6 : Un enfant nous est né, un fils nous est donné.
  • Psaume 95 : Aujourd’hui un sauveur nous est !
  • Tite 2, 11-14 : La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes.
  • Luc 2, 1-20 : Marie mit au monde son fils, premier-né.

Messe du jour

  • Isaïe 52, 7-10 : Éclatez en cris de joie, vous, ruines de Jérusalem.
  • Psaume 97 : La terre entière a vu le salut que Dieu nous donne.
  • Hébreux 1, 1-6 : Dieu nous a parlé par son Fils.
  • Jean 1, 1-18 : Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu.

Lire les textes de la liturgie

Il vient dans le monde, quand même !

Icône de la Nativité Atelier saint André (Assens, Suisse)
Ecole de Novgorod, 15ème siècle

L’homélie

Frères et Sœurs,

Souvent nous avons une représentation un peu trop idéale, idyllique de la nativité. Dans nos églises et nos maisons, on aménage des crèches bien à l’avance. La paille est toute propre. On attend simplement le dernier moment, pour déposer l’enfant Jésus au centre. Un peu comme si tout avait été magnifiquement préparé il y a deux mille ans, et qu’on n’attendait que sa venue.

Quand je prie avec les textes d’Evangile de ce jour, je me rends compte que c’est exactement le contraire ! « Il n’y avait pas de place pour eux à l’hôtellerie » selon Luc. « Le monde ne l’a pas reconnu, les siens ne l’ont pas reçu » selon Jean. Joseph et Marie ne sont pas les bienvenus !

Cela réveille peut-être en nous une certaine mauvaise conscience : il n’y a pas de place pour le Seigneur dans ma vie ; ma porte lui est fermée. Toutefois nous ne sommes pas venus à cette célébration pour alimenter la mauvaise conscience qui parfois nous tourmente.

« Il n’y avait pas de place pour eux à l’hôtellerie » peut être compris autrement. Le règne de Dieu sur terre, c’est peut-être le règne de l’improvisation. Imaginez donc un peu le désarroi, la panique, l’angoisse de Joseph : il se retrouve au milieu de nulle part, avec une jeune épouse sur le point d’accoucher. Joseph n’a pas trouvé de solution, et donc ce qui devait advenir advient, sans qu’il puisse le contrôler. L’enfant devrait naître et il vient au monde, alors que ses parents ont les pieds dans le fumier.

C’est donc dans la désorganisation de nos vies, dans l’improvisation, dans l’obscurité, dans le désordre causé par l’injustice du monde, que Jésus advient. Il semble ne pas y avoir beaucoup de place pour Dieu, quand il vient dans le monde, mais il y vient quand même ! Je peux me sentir mal : « Mon réveillon n’était pas prêt. Je ne suis pas prêt : mon équilibre spirituel n’est pas atteint. L’Avent a filé beaucoup trop vite, alors qu’il y avait quatre semaines pleines … » Tout cela n’empêche pas le Seigneur de venir. Il n’attend pas la suite d’honneur dans nos vies pour y venir. Il vient dans le brol de nos vies…

Jésus naît donc dans une grotte, ou une étable, ou quelque chose du genre. Il y avait probablement d’autres personnes sur place, puisque des foules entières avaient été jetées sur la route ; les pauvres sont rarement seuls à souffrir des circonstances. On devait donc se bousculer dans la crèche ! Telle est la compagnie de Jésus quand il advient : non pas une armée de religieux en col romain, mais des hommes et des femmes jetés sur les routes ainsi que des bergers. Mais imaginez la joie partagée, malgré l’odeur de fumier, lorsque le groupe de gens simples, réunis dans le même abri, entend les cris de l’enfant après les douleurs de l’enfantement. Il y a eu un fameux « hourra » ! On s’est félicité, on s’est frappé dans le dos, pour cette bonne nouvelle.

Vu sous cet angle, vous comprenez pourquoi Noël est la fête des petits, des pauvres, des simples. La fête de ceux qui sont solidaires dans l’adversité. Ceux qui savent se serrer un petit peu, ceux qui se réjouissent ensemble de la naissance d’une enfant. Les rois, les prophètes, les théologiens étaient aux abonnés absents, la nuit où Jésus est né. Quand Dieu s’engage parmi les hommes, quand il se mouille dans l’histoire humaine, ce sont des gens jetés sur la route, et des personnes vivant dans les plaines, qui sont les premiers à le rencontrer.

Enfin, un troisième point : Noël est la fête des sens. Nous sommes trop souvent cérébraux ; or notre tête nous maintient souvent à distance. Le charme d’un enfant, c’est qu’il nous oblige à quitter notre tête, pour le prendre dans les bras, pour le tenir contre notre joue. Personne ne laisserait un nouveau-né couché sur le sol. On le câline, on le couvre de bisous. Un nouveau-né qui n’aurait pas reçu tout cela, mourrait probablement.

C’est une invitation à nous laisser toucher, avant de réfléchir. Toucher par le Seigneur, avant de réfléchir aux arguments philosophiques en faveur de l’existence de Dieu. Toucher par nos voisins, plutôt que les mesurer, les soupeser du regard. Que de fois dans nos célébrations nous évitons de nous toucher, a fortiori après deux années de covid. Noël est une invitation à nous toucher, à serrer des mains, à nous embrasser pour nous souhaiter une sainte fête de Noël.

J’en vois blêmir. Aussi je précise qu’il y a un autre sens par lequel on peut toucher notre entourage. C’est la vue. J’imagine les bergers avoir un regard lumineux lorsqu’ils ont accompli leur mission. Imaginez leur surprise, mais aussi leur joie quand ils voient l’enfant et qu’ils le prennent dans leurs bras. Plutôt maladroits dans leurs gestes, mais si heureux de tenir ce bébé-là dans les bras. Pour une fois, ils sont les premiers ! Pour une fois, une promesse a été tenue à leur égard : c’était donc vrai ce que les anges leur avaient dit ! En quittant Joseph et Marie, ils chantent certes, mais ils ont surtout le regard lumineux. Est-ce qu’on nous reconnaîtra en ces jours de fête comme eux dont le regard pétille ? Comme ceux qui ont une étoile dans les yeux ? Ceux dont le regard rayonne ?

Je résume :

Souvent il n’y a pas assez de place pour le Seigneur dans nos vies. Plutôt que de repartir vexé, Dieu nous dit : « même dans le brol de ta vie, je parviens à me faire une place ».

Les petits nous précèdent parce qu’ils ont compris cela avant nous.

Comprenant cela à notre tour, sachons avoir le regard qui pétille : ce peut être notre manière de rendre témoignage à la lumière.

Père Thierry Dobbestein sj
Communauté Notre-Dame de la Paix, Namur

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Un chant pour accompagner notre méditation

Douce nuit

Paroles : Josef Mohr – Musique : Franz-Xaver Gruber

  1. Douce nuit, sainte nuit !
    Dans les cieux, l’astre luit.
    Le mystère annoncé s’accomplit
    Cet enfant sur la paille endormi,
    C’est l’amour infini ! (bis)
  2. C’est vers nous qu’il accourt,
    En un don sans retour.
    De ce monde ignorant de l’amour,
    Où commence aujourd’hui son séjour,
    Qu’il soit Roi pour toujours ! (bis)
  3. Paix à tous ! Gloire au ciel !
    Gloire au sein maternel,
    Qui pour nous, en ce jour de Noël,
    Enfanta le Sauveur éternel,
    Qu’attendait Israël ! (bis)