
Jeudi 17 avril 2025
La Cène du Seigneur (C)
Lectures
- Exode 12, 1-8.11-14 : Ce jour-là sera pour vous un mémorial.
- Psaume 115 : La coupe de bénédiction est communion au sang du Christ.
- 1 Corinthiens 11, 23-26 : Ceci est mon corps, qui est pour vous.
- Jean 13, 1-15 : Vous devez vous laver les pieds les uns aux autres.
Lire les textes de la liturgie
Il les aima jusqu’à l’extrême.
La Cène du Seigneur, Berna
Bernadette Lopez, Évangile et Peinture
Homélie
Frères et sœurs,
Comme chaque année, la liturgie du Jeudi Saint nous fait entendre deux textes majeurs du Nouveau Testament, l’un et l’autre, l’un avec l’autre. Ces deux textes parlent de manières différentes de l’amour extrême de Dieu qui s’est manifesté pour nous en Jésus-Christ. Ils sont en quelque sorte les deux faces d’un même message.
Tout d’abord, le récit de l’institution de la Cène dans la première épitre de Paul aux Corinthiens.
Ce récit de Paul est le plus proche, dans le temps, de la mort de Jésus puisqu’il date des années 50-55, une vingtaine d’années après sa mort. Il témoigne de la pratique eucharistique des premières communautés chrétiennes.
L’évangile de Jean, lui, rapporte l’épisode du lavement des pieds des disciples peu avant la mort de Jésus mais, étrangement, ne dit rien de l’institution de l’Eucharistie au cours du dernier repas avec les disciples. Pourtant le mystère de l’Eucharistie est omniprésent dans l’Evangile de Jean. Cet évangile, en effet, contient de nombreux signes et symboles de l’Eucharistie. Pensons, par exemple, au récit des noces de Cana, de la multiplication des pains, de la rencontre avec la samaritaine ou du discours de Jésus sur le pain de vie. L’Evangile de Jean rempli de symboles de l’eucharistie nous invite à lire l’Evangile et à lire notre vie elle-même à la lumière du mystère eucharistique.
Les ceux récits nous donnent à contempler le « sans mesure » de l’amour de Jésus-Christ pour nous au nom de son Père. « Il les aima jusqu’à l’extrême », dit l’évangile de Jean.
Dans le premier récit, celui du lavement des pieds, l’évangéliste, manifestement, souligne l’importance et la solennité du moment. Jésus, trahi par Judas, sait qu’il va passer de ce monde à son Père, souffrir et mourir. En cette heure grave, que peut-il encore dire à ses disciples, que peut-il encore faire à leur endroit pour accomplir la mission que le Père lui a confiée ? « Sachant que le Père lu a tout remis en ses mains, il les aima jusqu’au bout », écrit l’évangéliste Jean. Comment ? Durant le repas, voici qu’il se lève de table, dépose son vêtement, se ceint d’un linge, lave les pieds de ses disciples et les essuie avec le linge qu’il avait à la ceinture. Ce lavement des pieds est un geste d’entretien humain, simple, concret, d’une humilité désarmante. Les pieds sont la partie la plus basse du corps humain ; les pieds disent notre proximité avec l’humus, notre appartenance à la terre. Les pieds, c’est ce qui se salit en premier dans la poussière, ce qui est écorché par la rugosité du sol, par les pierres du chemin. Et Jésus, en lavant les pieds des disciples, par ce geste simple, se fait ainsi soignant.
Mais les pieds sales et blessés sont aussi ce qui permet de marcher, d’avancer, de prendre la route. Jésus qui lave les pieds, c’est Jésus qui nous remet sur le chemin et invite à faire de même. « Comprenez-vous ce que je vous ai fait. Si moi, le Seigneur et le maître, je vous, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns des autres ». Par la parole et le geste, Jésus institue ici une communauté de disciples fondée sur le commandement du soin mutuel, du service réciproque. Ce que Jésus demande ici, c’est que l’amour qu’il entretient avec son Père et qu’il éprouve pour ses disciples, se répande entre les disciples eux-mêmes : « Je vous ai donné un exemple pour que vous fassiez comme je l’ai fait ». Il n’y a pas de plus grand amour que de poser, de déposer, de disposer sa vie pour ses amis. Aimer ainsi jusqu’au bout à l’exemple de Jésus ne relève pas de l’héroïsme mais prend forme dans les tâches quotidiennes, minuscules mêmes, portées avec amour, conduites avec respect, délicatesse et attention à l’égard de chacun jusque dans le détail. En tout aimer et servir, selon la formule de saint Ignace.
Cet amour extrême qu’on lit dans le lavement des pieds est là aussi identiquement dans le repas de la dernière Cène que nous rapporte saint Paul et les évangiles synoptiques. Comme dans le récit précédent, le moment est solennel. Mais ici, ce qui est en jeu, plus que le service mutuel, c’est le don de soi jusqu’à mourir. Alors qu’il va être livré et souffrir sa passion, Jésus va poser un acte qui, en quelque sorte, résume, récapitule et actualise dans un seul geste et d’un seul coup ce que fut sa vie : une vie donnée, une vie passée à faire le bien quoi qu’il en coûte. Voici qu’il prend du pain, rend grâce, rompt le pain et le donne à chacun des disciples, en disant « Prenez, mangez, ceci est mon corps livré pour vous ». Dans ce geste simple du don du pain, c’est Jésus lui-même qui se livre, qui anticipe sa mort, aime jusqu’à l’extrême ; il se dépouille de son propre corps et donne sa vie pour ses amis. Le « ceci » désigne Jésus lui-même qui se fait nourriture, qui se donne pour ses amis. Le « ceci », c’est la Cène, le repas, le partage fraternel du pain et de la coupe, mais aussi toute la scène : le lieu, les circonstances, les protagonistes présents, les paroles et les gestes. Le « ceci est mon corps », c’est tout cela. C’est le corps du Christ lui-même et c’est aussi le corps communautaire des disciples qui partagent le pain et le vin en son nom, en mémoire de Lui dans une alliance nouvelle dans laquelle Jésus vient, se rend présent. « Ceci est mon corps qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi ». Par ces paroles, Jésus institue une communauté de partage en souvenir de lui, mort, livré, broyé pour nous. Et après sa mort, voici qu’un nouveau temps s’ouvre durant lequel il vient. « Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez à cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne ». L’expression est forte et audacieuse. La mort de Jésus appartient au passé. Et maintenant, aujourd’hui même, après sa mort, nous sommes dans le temps de sa venue. Jésus, corps livré, vient. Il vient dans l’alliance fraternelle que nous formons en son nom ; il vient dans nos gestes de partage, il vient dans les eucharisties que nous célébrons ; il vient et nous le reconnaissons vivant, ressuscité, chaque fois que des hommes et des femmes, de par le monde, se font nourriture et providence pour autrui.
L’Eucharistie n’est pas un rite figé, une piété privée. Elle est service, don de soi, abaissement à l’image du Christ. Recevoir le Corps du Christ, c’est devenir son corps pour le monde. C’est se laisser transformer pour aimer comme Lui, jusqu’au bout, même dans les choses les plus humbles. Adorer le Christ dans l’Eucharistie, c’est aussi le reconnaître dans les pieds fatigués de nos frères. C’est dans l’intimité du cœur et dans le concret du service que se vit la vraie communion. L’Eucharistie, elle ne va pas sans qu’on lave les pieds fatigués.
Aussi, frères et sœurs, la messe n’est pas finie quand nous quittons l’église. Elle se prolonge dans nos maisons, nos lieux de vie, partout où nous sommes appelés à laver les pieds des autres par la patience, le pardon et l’attention aux plus petits.
Père André Fossion sj
Communauté Notre-Dame de la Paix. Namur
La prière universelle de ce dimanche
Le célébrant : Réunis ce soir autour de l’Autel, dans l’émerveillement du don que nous fait le Christ de son Corps et de son Sang, prions Dieu notre Père
R/ : Par Jésus-Christ ton serviteur, nous te prions Seigneur !
- Pour le Pape, les évêques, les patriarches et les prêtres du monde entier, ministres des Sacrements :
afin qu’ils soient comblés de grâces et soutenus par ceux qui les entourent,
prions ensemble. - Pour les chrétiens persécutés en Irak et dans bien d’autres pays
qui ne peuvent célébrer l’Eucharistie :
afin qu’ils ne perdent pas courage et ne se sentent pas abandonnés,
prions ensemble. - Pour tous ceux qui, du fait des guerres ou de la maladie, vivent dans la peur et l’angoisse :
afin que des frères et des sœurs leur apportent des lueurs d’espérance,
prions ensemble. - Pour tous ceux qui, en ces Jours saints, dans notre société occidentale,
vivent comme si Dieu n’existait pas :
afin qu’un jour, ils ouvrent leur cœur à sa Parole d’amour,
prions ensemble. - Pour nous tous qui allons recevoir Jésus Eucharistie :
afin que nous acceptions de nous laisser transformer
à son image et à sa ressemblance,
prions ensemble.
Le célébrant : Dieu notre Père, toi, l’ami des hommes, écoute notre prière et veuille l’exaucer par Jésus, le Christ, notre Seigneur.
Abbaye Bénédictine Notre-Dame de Jouarre France
Un chant pour accompagner notre méditation
Comme lui savoir dresser la table
Paroles et musique : Robert Lebel
Comme lui, savoir dresser la table, Comme lui, nouer le tablier,
Se lever chaque jour et servir par amour, comme lui.
- Offrir le pain de sa Parole
Aux gens qui ont faim de bonheur.
Être pour eux des signes du Royaume
Au milieu de notre monde. - Offrir le pain de sa présence
Aux gens qui ont faim d’être aimés.
Être pour eux des signes d’espérance
Au milieu de notre monde. - Offrir le pain de sa promesse
Aux gens qui ont faim d’avenir.
Être pour eux des signes de tendresse
Au milieu de notre monde.